
Inutile de dire qu'ils se sont faits gauler aussi sec.
Oh ! ce n'est certes pas l'affaire du siècle ; on n'a pas fait appel à Eliott Ness et ses limiers les G-Men. Auxquels nos gendarmes locaux n'ont rien à envier d'ailleurs. Mais l'histoire est assez tordante et les détails cocasses. D'où l'urgence, lorsqu'on est abruti comme un nasique et pété comme un coing, de rester chez soi !
« Le zonard des étoiles »
Dans la nuit du 10 au 11 octobre 2016, à Bras-Panon où ils résident (c'est déjà pas futé-futé), quatre monte-en-l'air à la petite semaine décident d'aller se refaire. Comme « Kebra, le zonard des étoiles » de Tramber et Jano, pour vous situer le niveau intellectuel de nos lascars. C'est que dame ! lorsqu'on a les poches plus vides qu'un discours de politicien, faut les remplir. Et quand on a un certain nombre de degrés d'alcool derrière la luette, on coupe au plus court : il y a pas mal de baraques dans le coin ; il y a sûrement là-dedans de bonnes choses à taxer.
C'est parti...
Emmanuel, Marius, Dylan et Gervais, entre 25 et 32 ans, n'y réfléchissent pas à deux fois. « C'est dans l'horreur d'une profonde nuit... » qu'ils vont visiter 9 maisons, assez proches les unes des autres : akoz court loin po fatigue le cadav' ?
Dans leur périple aussi pittoresque que comique (sauf pour leurs victimes), ils chopent quelques meubles ici, une Xsara là, quelques bricoles un peu plus loin. Pas de triage dans leur café ; tout est bon à gratter.
Avec les inconvénients idoines et adéquats, disait Bérurier.
« Ils ont vidé mes marmites »
Une fois, par exemple, ils sont fort préoccupés à investir la véranda d'une maison, véranda bien visible de la route. Il fait noir comme dans une âme d'usurier mais ils n'en ont cure ; et s'agitent comme de beaux diables pour trouver à crocheter cette fichue porte d'entrée qui leur résiste bêtement. Passer inaperçus les laisse froids. C'est alors que passe un automobiliste très étonné de toute cette agitation aussi désordonnée que suspecte.
Ce brave homme klaxonne de façon furibarde, histoire d'alerter le propriétaire des lieux, ce qui ne manque pas d'arriver. La lumière surgit à l'intérieur, éclabousse la véranda ; nos Arsène Lupin pays s'esbignent la queue entre les jambes.
Une autre fois, c'est une propriétaire accablée par l'insomnie qui entend des bruits suspects et aperçoit les malandrins au-dehors, sous sa véranda (il y en a beaucoup dans le coin), fait un pétard de tous les diables. Ce qui met nos mini-vandales en fuite une fois encore. Car, il faut bien le dire, nos apprentis cambrioleurs ne sont pas des violents (du moins cette nuit de libations intenses) et n'ont guère envie de se colleter avec un propriétaire qui peut être costaud, va savoir !
Trois cases plus loin, sentant une petite faim « d'après boire » leur titiller l'estomac, au lieu de voler, ils envahissent la cuisine et raclent les fonds de marmite. « Zot la mange toute, les fid'garce », dira le propriétaire des lieux, amusé, aux gendarmes.
L'indispensable cellule de dégrisement
Les gendarmes sont vite avertis de ce curieux manège nocturne car nos frappadingues sont à mille lieues de se douter que tout ce qui vit dans le coin les a aperçus. Deux des comiques sont tout-de-suite arrêtés. Ils ne tentent pas la moindre résistance. On l'a dit, ce ne sont pas des violents de la cambriole : il y a d'autres occasions pour ça.
Dans une ruelle, on retrouve la Xsara cramée. A côté de divers objets qui n'ont pas été emportés. Trop lourds sans doute ? Les deux autres comparses seront arrêtés à leur tour peu après. Fin de cavale. Les quatre ont d'abord été placés en cellule de dégrisement, le temps qu'il y ait un peu plus de sang dans leur alcool.
Détail cocasse... Lors de sa plaidoirie, une des avocates mettra en avant le fait que si son client n'a pas cherché à fuir, c'est qu'il était complètement pété et n'en avait donc pas la force. Ce qui a plié la salle en quatre mais pas sûr que ce fût en faveur du bonhomme.
Pas contrariants pour un rond.
A la barre, nos comiques reconnaissent tout ce qu'on veut et même ce qu'on ne veut pas. La queue tortue lé courte ? Azot minm l'auteur !
Marius comparaissait détenu, embastillé en attendant un prochain passage aux Assises. Un casier judiciaire vierge avant ce jour, père de trois enfants...
Dylan aussi était venu entre gentils accompagnateurs, détenu pour incendie. Déjà quatre fois condamné pour violences en réunion, trafic de stupéfiants, recels de vols, vols aggravés plus quelques bricoles dans d'autres dossiers encore à l'instruction.
Gervais, lui, est passé six fois déjà devant les juges : vols aggravés, conduite après charrette (plusieurs fois), deux séjours déjà derrière les barreaux. « Mais pourquoi tous ces vols ? » demande le président Molié. Sa réponse, je vous la donne en mille : « J'avais des problèmes dans ma vie ». « Qui n'en a pas ? lui a répliqué le président. Mais tout le monde ne vole pas ».
Emmanuel, costaud bavard mais incompréhensible, a le casier le plus chargé avec 12 mentions à son CV, notamment des séries de vols avec violence. « Un bon client », a dit le président.
Les quatre drôles ayant tout reconnu, l'audience n'a donc pas été rallongée. Mais nous n'étions pas au bout de nos surprises...
Un avocat a disparu !
Au moment de donner la parole à la procureure pour ses réquisitions, le président s'aperçoit qu'un des avocats de la défense a disparu. Audience suspendue... Il a fallu près de 20 minutes pour retrouver le fuyard... et 5 de plus pour retrouver ses deux confrères qui en avaient profité pour s'éclipser à leur tour.
Quand je vous dis que ça peut être tordant, les séances de la Correctionnelle.
La procureure Delmoitié n'a pas cogné trop fort sur ces clampins qui n'ont fait preuve d'aucune violence physique. Ce qui surprend quand on voit leurs méfaits antérieurs.
Les peines : de six mois fermes à huit dont cinq avec sursis.